jeudi 14 décembre 2017

Ces rêves qu'on piétine (Sébastien Spitzer)






                      - Auteur : Sébastien Spitzer
                      - Publication : 23 août 2017
                      - Edition : éditions de l'Observatoire
                      - Collection : /
                      - Genre : contemporain, historique
                      - Pages : 308
                      - EAN-13 : 9791032900710






Résumé

Allemagne, avril 1945. Les parcours croisés de Magda Goebbels, femme la plus puissante du IIIe Reich, et d'Ava, trois ans, enfant du KZ-Bordell d'Auschwitz. Tandis que les alliés progressent, la première s'enfonce dans l'abîme de la folie nazie et la seconde, miraculée de l'horreur, tente d'échapper à son destin.

 
Mon avis
 
J'ai découvert ce livre grâce à Margaud Liseuse, encore une fois. Sa critique en était tellement élogieuse et son enthousiasme tellement communicatif que mes doigts se sont posés automatiquement sur lui quand je l'ai vu en librairie ! Je n'ai pas eu un coup de cœur comme Margaud... mais franchement, il s'en est fallu d'un cheveu !   
 
L'écriture ! Non mais cette plume ! Pour moi, c'est LE gros point fort de ce roman. La plume de Sébastien Spitzer est incroyable ! Le vocabulaire utilisé est extrêmement riche et la syntaxe est magnifique. J'aurais pu coller des post-it sur à peu près toutes les pages pour marquer les phrases qui me sautaient aux yeux ! L'auteur est capable de transmettre une quantité d'émotions à travers ses écrits, de nous faire ressentir une foule de sentiments en à peine quelques mots et avec une justesse incroyable. Il parvient également à transcrire toute la tension, toute l'horreur de la guerre de manière extrêmement fluide. C'est une plume qui vous émeut mais qui vous prend aussi aux tripes ! Les mots utilisés sont magnifiques lorsque l'auteur décrit des émotions, des sentiments, des souvenirs, en particulier lorsque l'on suit Ava. En revanche, lorsque l'auteur décrit la guerre, les complots, la folie des Goebbels et de Hitler, les mots deviennent tranchants ! Je me suis réellement sentie étouffée lorsque l'on suivait Magda dans le Führerbunker, j'ai grincé des dents lorsque j'ai lu ses pensées, j'ai eu des frissons de dégoûts en en apprenant plus sur Joseph Goebbels. Vraiment, j'ai du mal à décrire la beauté et la justesse de cette plume !

L'histoire est un mélange entre des faits réels, fictionnels et des interprétations de l'auteur de certains éléments historiques visant à combler les vides de l'Histoire. J'ai été touchée par le récit d'Ava, personnage fictionnel mais qui aurait tout à fait pu exister durant la guerre (et qui a peut-être réellement existé sous un autre nom d'ailleurs). Je l'ai trouvé émouvante mais également très dure à lire car elle nous confronte à l'horreur des camps de concentration vue de l'intérieur, vécue par une victime ! J'ai également été passionnée par l'histoire de Magda Goebbels. Passionnée oui. Dégoûtée, révulsée, aussi. Mais j'ai trouvé extrêmement intéressant d'en apprendre plus sur la jeunesse de cette femme, sur le chemin qu'elle a parcouru, sur le "comment" elle en est arrivée à de pareilles atrocités ! J'ai toujours été très intéressée par l'histoire des deux guerres mondiales, particulièrement par celle de la seconde. Et j'ai ici découvert tout un pan de l'histoire que je ne connaissais absolument pas : les derniers jours du 3ème Reich, de son dirigeant et de ses partisans. Certains passages font l'objet d'une interprétation de la part de l'auteur afin de combler des inconnues dans le déroulement des événements. Toutefois, j'ai trouvé ces passages tout à fait plausibles ! Le roman en lui-même a fait l'objet d'un grand travail de recherche, et ça se sent ! Je l'ai trouvé passionnant et très intéressant même si j'ai mis un peu de temps à me situer au début. Il faut toutefois reconnaître que c'est un récit très dur, qui relate un pan de notre histoire absolument abject ! Et Sébastien Spitzer aura merveilleusement réussi à intéresser le lecteur tout en l'interpelant et en dénonçant les atrocités que l'Homme est capable de commettre et tente d'oublier à l'heure actuelle. Pour moi, ce roman est aussi un appel à éviter que de telles dérives ne se reproduisent et à ne pas oublier !

Les personnages principaux sont à l'opposé l'une de l'autre, et très complexes. Nous avons d'un côté Ava, qui est née dans un camp de concentration, dans le bloc des "prostituées",  et a toujours vécu cachée car elle n'avait pas le droit d'exister. En suivant Ava, le lecteur suit d'abord plusieurs victimes des camps qui côtoient l'enfant de près ou de loin. Chacune raconte son histoire, son passé et leur rafle. Au fur et à mesure, nous nous rapprochons de Ava, jusqu'à arriver au point de vue de l'enfant elle-même. J'ai trouvé son récit et celui de tous les autres très touchant mais également très durs à lire car il témoigne de toutes les horreurs vécues par les victimes des camps de concentration. Il s'agit du récit d'une enfant qui n'a vécu qu'enfermée, cachée. Une enfant qui n'a jamais parlé et qui ne fait qu'écouter et observer. Une enfant dont la mère s'est battue jusqu'à la mort, a donné sa vie, pour qu'elle puisse survivre. Et en parallèle, nous avons Magda Goebbels qui n'hésite pas à tuer ses six enfants car elle ne croit pas en un monde duquel le 3ème Reich serait absent ! L'histoire de Magda est opposée à celle d'Ava. Contrairement à l'enfant, cette femme a réellement existé et le lecteur suit son histoire véridique, avec quelques interprétations de l'auteur visant à combler certaines zones d'ombre. J'ai trouvé l'histoire de Magda très intéressante, car elle nous permet de découvrir un acteur de la seconde guerre mondiale dont on ne parle finalement pas beaucoup car étant davantage dans l'ombre que sur le devant de la scène. Je ne cautionne évidemment pas les agissements abjects de cette femme mais j'ai apprécié de pouvoir suivre son histoire, depuis le début, et de découvrir comment et pourquoi elle en est arrivée à tenir ce rôle. Magda raconte son histoire sous forme de flashback, alors qu'elle vit ses derniers jours dans le Führerbunker. Le lecteur en apprend donc plus sur son enfance, sa jeunesse, ses ambitions dévorantes, son sentiment d'infériorité et cette avidité, ce désir de pouvoir et de reconnaissance. Et l'on apprend que Magda fut jadis amoureuse d'un juif ! Que son beau-père était juif ! J'ai ri jaune en apprenant cela, car cela me fait évidemment penser à Hitler qui prônait la race Arienne alors que lui-même ne correspondait à aucun des critères qu'il mettait en avant ! Un paradoxe et une ironie incroyables (dans le mauvais sens du terme) selon moi. Si Ava m'a vraiment touchée, Magda m'a révoltée, révulsée, dégoûtée ! Les Goebbels sont un bel exemple de ce que l'Humanité peut faire de pire...

En bref


C'est un livre que je conseille chaudement, que ce soit pour l'aspect historique que pour la beauté de la plume de l'auteur. Un ouvrage merveilleusement bien écrit et très intéressant car il nous amène à réfléchir, et à découvrir des éléments historiques qui se font plus discrets. On apprend à découvrir Magda Goebbels, ses origines, son histoire et sa famille. Elle est opposée à Ava, une petite fille née dans les camps de concentration et tirée de l'imagination de l'auteur (mais peut-être pas tant que ça) qui se bat pour survivre. Deux personnages extrêmement complexes qui poussent à la réflexion.

Ce n'est pas un coup de cœur mais j'ai tout de même adoré ce livre. Un ouvrage qui appelle le lecteur à ne pas oublier, à se souvenir, pour éviter que de telles atrocités ne se reproduisent. Un excellent premier ouvrage pour Sébastien Spitzer, dont je n'hésiterai pas à lire les prochains écrits !
     

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